Les super-héros reprennent le mythe antique du surhomme, des dieux et demi-dieux comme Hercule, Ulysse, Persée et j’en passe. Ce type d’histoire se base sur la fascination du spectateur à voir des gens qui lui ressemblent faire des choses extraordinaires. Que ce soit un sentiment de catharsis, de procuration ou tout simplement l’envie de nous élever au même rang qu’eux, ce genre d’archétype a fasciné l’humanité depuis des millénaires.
Le monde Marvel s’inspire d’ailleurs de la mythologie romaine, nordique et même de certains mythes comme Dracula ou Frankenstein.
Et voir ces demi-dieux accomplir des exploits surhumains continuera de nous inspirer encore pendant longtemps. Je pense qu’il y a quelque chose d’intrinsèquement humain ici, l’envie d’être plus fort, plus intelligent… devenir meilleur.
– Ce type d’histoire renvoie au complexe de Dieu, ou aux prophètes comme Jésus ou Mohammed.
En reconnaissant des qualités humaines chez un être qui ne l’est pas, on peut projeter des attributs à ces personnages qui nous permettent d’incarner nos désirs et nos peurs.
Tous les gamins qui portent le masque de leur super héros préféré peuvent s’identifier à lui et l’incarner puisqu’il n’a pas vraiment de « visage ». En revêtant le même costume, on se sent Spiderman, on devient l’idole. Un symbole ne meurt jamais tant que quelqu’un est là pour endosser le masque.
Les films et les comics de super-héros ne se résument pas à des gars en collant, ce sont des odyssées contemporaines, chacune porteuse d’espoir !
Le Spiderman de Sam Raimi sort après les événements du 11 septembre ; dans la bande annonce on voyait Spiderman tisser sa toile entre les deux tours du Wall Trade Center (même si ces images ont disparu après les attentats évidemment) – les gens avaient besoin de la représentation d’un héros aux valeurs sûres !
Pour la petite anecdote :
Quand Stan Lee a présenté pour la première fois Spiderman à son éditeur, il a dit :
« Je veux faire un héros qui sera l’homme-araignée, c’est un adolescent qui a un million de problèmes… Tout va mal dans sa vie ! »
Son éditeur lui a répondu :
« Premièrement personne n’aime les araignées, tu ne peux pas l’appeler l’homme-araignée, deuxièmement un ado ne peut pas être un rôle-titre, seulement un second couteau, et pour finir, un héros n’a pas une multitude de problèmes, c’est pour ça qu’ils sont des héros »
Et pourtant malgré les dires de son éditeur, Spiderman est porteur de la phrase la plus connue des super-héros : « un grand pouvoir implique de grandes responsabilités ! »
Ce qu’il faut surtout retenir ici, c’est qu’à l’origine les super héros n’étaient pas vraiment conçus pour nous ressembler. Ils devaient être une version idéalisée de nous-mêmes, parfaite, sensée nous faire rêver.
Bien évidemment, au cours du temps ces idées ont changé, pour créer des personnages plus proches de nous, plus humains.
Captain america et Superman arrivent aussi durant des crises historiques.
Beaucoup de super-héroi/ïnes ont une cause à défendre :
Wonder Woman a porté l’étendard de l’émancipation féminine quelques temps, même si le regard porté sur ces personnages provient surtout du male gaze (regard masculin).
Le 21 octobre 2016, l’ONU désigne le personnage comme ambassadrice honoraire pour défendre l’égalité des sexes :
Lynda Carter et Gal Gadot sont invitées par l’organisation, mais cette « alliance » ne durera que deux mois. Pour cause, des pétitions hyper médiatisées de groupes féministes reprochant leurs mensurations « idéalisées » et leurs tenues un peu trop sexualisées.
Mais la représentation des femmes chez Marvel et DC ne passe pas que par Wonder Woman.
On a aussi Jessica Jones, Miss Marvel, Captain Marvel, Phantom Lady (1941) et bien d’autres.
La représentation des minorités visibles passe par un nouveau Spiderman, Luke Cage, Black Panther, Tornade et d’autres.
X Men parle d’ailleurs de la différence et de la ségrégation avec un professeur Xavier se rapprochant de l’idéologie de Martin Luther King et un Magneto se rapprochant de Malcom X (à ses débuts).
Les valeurs patriotiques sont portées par Captain America, désigné comme un héros défensif (portant un bouclier plutôt qu’une mitraillette ou une épée). Au final, Captain America n’était qu’une espèce de propagande, une sorte de pamphlet anti-nazi. Mais il représente plus une utopie que l’idéal de l’impérialisme américain.
Dans beaucoup d’histoires le super-héros doit d’abord faire face à sa différence a l’instar de Frankenstein.
Le sentiment que le monde n’est pas fait pour nous, l’impression que la foule nous pourchasse, torche à la main est largement incarnée par l’image du super-héros… Lorsque la différence devient un fardeau, et qu’une malédiction se cache derrière chaque pouvoir, au final le genre explore la nature même de l’extraordinaire, de la peur de l’inconnu et de l’étranger.
Un lien d’empathie se crée aussi pour ces personnes qui nous aident mais qui restent parfois incomprises comme Arrow, Spiderman ou Superman qui subissent les mêmes préjugés que Jésus ou Jeanne d’Arc.
Ce genre d’individus extraordinaires sont « élus » pour accomplir une grande tâche, sortir des rangs et devenir des « sauveurs ».
Umberto Eco écrit dans son recueil « De Superman au Surhomme », que, malgré leur pouvoir considérable, les super-héros ne modifient pas tant que ça l’équilibre du monde (c’est pour cette raison que j’adore le film Logan qui présente le professeur Xavier comme une arme de destruction massive. Ce dernier, vieux et sénile, doit être capturé car sa maladie lui provoque des crises qui peuvent tuer des milliers de gens)
Même si la base peut être très manichéenne, l’archétype du super héros a varié énormément au cours du siècle.
Pour Umberto, le Comte de Monte-Cristo est déjà un prototype du héros surhumain. On a quelqu’un aux qualités exceptionnelles (ruse et immense fortune), usant d’une double identité et rétablissant la paix et l’harmonie.
Mais aujourd’hui on peut dire autre chose avec les super héros et le genre n’a cessé d’évoluer pour traiter toutes les strates possibles.
Au final, être super-héros, c’est avant tout être humain. Vous pouvez leur donner des toc, des phobies, des tics et d’autres caractéristiques qui ne peuvent être résolues par un grand pouvoir.
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