Comment écrire une structure en trois actes ?

C’est la structure la plus simple, la plus ancienne et la plus basique qui soit. Aristote en parle dans « la poétique » (rédigée vers 330 avant J-C) et cette base pour les histoires est quasi universelle.

On a trois actes, autrement dit : un début, un milieu et une fin.

Encore une fois, je ne le répéterais jamais assez, en scénario il n’y a pas de règle précise pour la dramaturgie. Les principes que j’expose ne sont en aucun cas des règles à appliquer à la lettre. Ce ne sont pas des obligations mais des conseils.

Voilà ce que Robert McKee dit dans l’introduction de son manuel :

« Story présente des principes et non des règles. Une règle consiste à dire : c’est comme cela qu’il faut faire, alors qu’un principe suggère que cela fonctionne et a toujours fonctionné ainsi depuis le début des temps. La différence est cruciale. Il n’est pas nécessaire de reproduire le schéma de la pièce bien faite, cependant votre texte doit être bien fait d’après les principes qui forgent notre art. Les scénaristes angoissés et inexpérimentés obéissent aux règles. Les scénaristes rebelles et ignorants brisent les règles. Les artistes, eux, maîtrisent la forme ».

(NB : cet article fait référence à mes cours de Fac donnés par Martin Fournier.)

ACTE 1 – la prémisse ou l’exposition :

Profitez de ce moment-là, parce que pour l’instant le spectateur est prêt à vous croire pour tout ! Il sait que c’est une fiction mais c’est maintenant que vous devez poser les règles de votre histoire. Je m’explique :
Je vois beaucoup de films de science-fiction ou fantastiques qui se permettent des écarts énormes dans le deuxième acte. Et quand je dis « écart » je veux dire que le scénariste met en place des actions un peu abusées, sorties de son chapeau, et qui facilitent la résolution du conflit.

Dans la série Once Upon a time par exemple, comme les règles de la magie n’ont pas été posées directement, il leur suffit d’un cheveu et d’une larme pour créer un portail inter dimensionnel alors que dans la première saison, créer ce genre de portail était déjà considéré comme une magie ultra puissante. On a un peu l’impression que le scénariste peut dire n’importe quoi et le justifier par la magie.
Dans le Seigneur des anneaux, si Frodon résiste à la puissance du soleil en pleine face, et que le scénariste justifie en disant « ouais mais c’est un monde magique », ça ne marche pas ! Il n’a jamais été dit que Frodon pouvait résister à des températures supérieures à celles qu’un homme peut endurer et, à moins d’avoir spécifié le contraire, on se basera sur les règles physiques qu’on connait.

Donc si vous faites un scénario fantastique, n’oubliez pas de dire les limites de la magie dans ce monde, pour éviter que le spectateur ait l’impression que vous écrivez n’importe quoi tant que ça fait avancer l’histoire.

Samuel Taylor Coleridge (1817) nomme ce phénomène suspension consentie de l’incrédulité (willing suspension of disbelief). Y. Lavandier (La Dramaurgie) parle de trêve de l’incrédulité.

C’est à ce moment-là que vous pouvez dire n’importe quoi (enfin vous m’avez compris) :
– Les scarabées vivent sur terre à la place des hommes,
– les robots mangent des sandwichs au thon parce qu’ils adorent ça,
– Razzade Production est maintenant plus riche que Google,

Vous pouvez dire ce que vous voulez ! Posez les bases !

Tenir ses promesses :

Ecrire un scénario c’est comme faire un programme politique, à deux trois choses près 😉

A part certaines exceptions, la plupart des films se classent dans un genre particulier qui répond à des codes précis.
Même si vous avez le droit de vous éloigner un peu de ces codes, si vous faites un truc complètement en dehors des clous, votre spectateur se sentira « trahi ». Lorsqu’il regarde un thriller, il ne s’attend pas aux mêmes choses que lorsqu’il regarde une romance.

A ce titre vous devez répondre aux attentes de votre spectateur quand il regarde le film.

Batman vs Superman a été vivement critiqué, je pense en partie à cause de son titre ! Les gens s’attendent à voir le combat le plus monumental de leur vie et ils n’en voient que 10 minutes ? Bullshit ! A part ça j’ai trouvé le film pas trop mal et la question de Superman habilement traitée. Mais bon, ce n’est que mon avis.

affiche batman vs superman

Quelques écueils à éviter :

Ne faites pas trainer votre premier acte. Essayez de ne pas dépasser 1/6ème de la durée entière de votre film. Sinon le risque est de ne pas laisser assez de place au 2ème acte et aux péripéties.

Enormément de courts métrages amateurs commencent par un jeune homme qui se lève et éteint son réveil sans que cela ne serve à la narration. Mais la plupart des courts métrages professionnels ont un premier acte extrêmement court.

Le premier acte doit amener l’élément qui va perturber ce statut quo qui pourrait durer indéfiniment. Une fois que le spectateur a compris de quoi il s’agit, ne faites pas durer les choses trop longtemps. Le public a besoin d’un élément qui viendra chambouler le tout pour que « l’histoire commence ».

Fin de l’acte 1 – Le premier nœud dramatique majeur

Avec l’événement perturbateur vient une question qui lance le ou les protagonistes dans l’histoire.
– « Va-t-il réussir à la séduire ? »
– « Comment va-t-il attraper le meurtrier ? »
Ils entrent dans une nouvelle dynamique dans lequel le sujet du film se dessine et où les enjeux sont clairs.
– « Notre protagoniste est seul, et c’est sa seule chance de goûter à l’amour. »
– « Si ce policier n’attrape pas le meurtrier, il sera viré. »

Afin de rendre cet élément perturbateur crédible et qu’il soit amené naturellement, on utilise souvent un élément déclencheur (même si pour beaucoup d’auteurs, le déclencheur et le perturbateur sont une seule et même chose.)

Et maintenant que les choses sont posées vous devez avoir un développement à la hauteur de la question posée au début du film.
Autant il est facile de faire entrer un spectateur dans son film, autant une fois qu’il en est sorti il est très compliqué de le faire revenir.

ACTE 2 - Le Développement

bateau sur l'océan

C’est ici que tout se joue ! C’est la partie la plus longue de votre film, il doit en faire au moins les deux tiers. Même si la résolution peut être assez simple à trouver (même si ça dépend du scénar) c’est le chemin qui est véritablement compliqué à écrire.

Parce que vous devez trouver les péripéties qui permettront au mieux la transformation de votre personnage et que ça se passe naturellement. En effet, votre protagoniste doit changer au cours de l’histoire mais votre spectateur aussi par extension. Donc il doit pouvoir s’identifier tout du long.

Prenez en compte le fait que le spectateur a souvent l’habitude de regarder des films. A force « d’entrainement » il sait assez vite où vous l’emmenez, donc il anticipe les résolutions. Si rien ne vient rompre cette logique, il risque de s’ennuyer puisque rien ne le surprend. Donc ne faites pas une histoire linéaire ou tout s’enchaine parfaitement et où les conflits ne sont que des simulacres.
On a tous vu un film où le protagoniste se bat contre un ennemi, un semblant de tension se crée mais on sait tous que le héros va gagner !

2ème et 3ème nœuds dramatiques majeurs :

Afin de garder le rythme et de ne pas perdre l’intérêt du spectateur, le scénariste ajoute souvent un 2ème nœud dramatique au cours de l’acte II. Ces évènements changent les questions qu’on se posait au début de l’histoire (« Va-t-il réussir à la séduire ? » peut devenir après une grosse dispute « est-ce qu’ils vont se remettre ensemble ? »). Les enjeux associés sont donc également modifiés.

A la fin de l’acte II, un évènement (3ème nœud dramatique) vient briser la dynamique installée jusqu’à présent de manière irrémédiable. Cet élément amène l’histoire à sa résolution et impose son dénouement.

ACTE 3 - Le dénouement :

bateau arrive au port

La question principale du film (celle posée dans l’acte 1 et modifiée aux cours des nœuds dramatiques) trouve sa résolution (sa réponse) dans l’acte 3 même si certains films proposent un constant sans réponse.  

Les intrigues et sous intrigues doivent être résolues ici sinon vous devez assumer pleinement l’absence de réponse.
Mais attention : ne pas confondre « fin ouverte » et « question non résolue ».
La première offre différentes fins possibles mais laisse le choix au spectateur de « choisir » celle qu’il préfère imaginer.
La deuxième laisse le spectateur dubitatif par rapport à la conclusion du film. Il se demandera sûrement ce que vous avez voulu dire et risque d’être frustré.

L’acte 3 est aussi le moment de révéler le Twist de l’histoire si vous en avez un.
Pour ceux qui ne le savent pas, un twist donne une information qui change complètement la donne. Le film peut être revu entièrement sous un nouvel angle parce que le spectateur a vu que la « vérité » était ailleurs.
Vous pouvez aussi terminer une comédie par une chute comme dans le diner de cons, où l’histoire va se répéter parce que l’un des protagonistes fait une autre erreur.

Que vous vouliez faire passer un message ou non, chaque film, par sa résolution, en fait passer un obligatoirement. Donc c’est à la fin de votre film que se loge la « morale » et autant essayer de la maitriser. Attention, ne vous lancez pas dans le dogmatisme et le jugement facile, essayez simplement de faire passer un message en accord avec vos pensées. 

Pour ceux qui veulent allez plus loin vous pouvez regarder ce Ted talk. 

N’hésitiez pas à partager cet article à ceux que ça pourrait intéresser et de commenter si vous avez des questions.

A la prochaine pour un autre article.

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