Comprendre l’intrigue et la motivation dans un scénario – Partie 2

Pour ceux qui n’ont pas lu la première partie sur les intrigues et la motivation des personnages je vous invite à la consulter avant de commencer celui-là. Sinon pour les autres, entrons dans le vif du sujet !

Nota Benne :

Cet article résume et s’inspire de beaucoup d’articles de SCENAR MAG qui possède une banque de données incroyable. J’ai évidemment sélectionné les infos qui me semblaient les plus pertinentes mais rien ne vous empêche d’y faire un tour pour découvrir d’autres sujets.

Les conflits, l’antagoniste et l’intrigue :

Pour qu’une intrigue fonctionne, votre protagoniste doit avoir un objectif, une motivation personnelle et des conflits intérieurs et extérieurs pour faire avancer la dramaturgie.

Faire en sorte que les enjeux augmentent ainsi que la difficulté au fur et à mesure de l’histoire pour garder le spectateur en haleine.
Les choses s’allégeront quand votre protagoniste aura changé.

Apprenez à connaitre votre personnage en détail, donnez-lui des forces et des faiblesses, et utilisez ça pour mettre en place votre intrigue. Peu importe votre histoire, ce sont les personnages qui donneront de la force à vos propos car c’est à travers eux que le spectateur vivra l’histoire.
Développer l’intrigue autour du personnage plutôt que l’inverse. L’histoire sera plus cohérente et puissante si les éléments s’agencent autour de vos personnages plutôt que si vous avez des personnages qui se greffent à une intrigue qui « ne les concerne pas vraiment ».  

Le héros ne se défini que par la puissance de son antagoniste, mais ce dernier n’a de valeur que s’il est créé pour mettre des bâtons dans les roues de votre personnage. 
Le Joker est parfait pour Batman car il remet en cause ses propres valeurs, il essaie de retourner le cerveau de Bruce Wayne pour lui faire croire qu’ils sont pareils… Le duo si mythique a propulsé le Joker au rang des méchants les mieux écrits de l’histoire, mais si ce clown psychopathe avait combattu Rambo, il n’aurait pas fait long feu – une balle dans la tête et plouf, on en entend plus parler. Batman refuse de tuer, c’est ce qui lui complique la tâche, ne pas devenir comme les méchants qu’il combat.

Définissez les peurs, les phobies et tout ce que déteste votre personnage. Créer ensuite un antagoniste qui pourra faire vivre le pire cauchemar à votre protagoniste.

Si votre personnage est agoraphobe il lui faudra une bonne raison de se rendre dans un endroit bondé pour tenter ensuite de surmonter ses peurs.

L’idéal est d’avoir comme le dit Truby, une intrigue (objectif, motivation, conflit) sur deux niveaux, extérieur et intérieur.
Sous un but apparent, votre personnage possède un objectif émotionnel caché.

Pour citer un exemple hyper classique, admettons que votre protagoniste doive trouver un trésor au bout du monde. Il se rendra compte au final que le véritable trésor était sous son nez depuis le début : sa femme et ses enfants.
Les évènements extérieurs révéleront au personnage sa faiblesse émotionnelle qu’il doit changer s’il veut vraiment atteindre son objectif intérieur caché.

Pour Ronald B. Tobias,  l’Enfer de Dante (de la Divine Comédie) est l’exemple parfait montrant que les conflits humains surviennent sur deux niveaux : le corps et la psyché.

Dans ce livre, l’enfer est composé de 9 cercles, en forme d’entonnoir, disparaissant dans les profondeurs de la terre. Les morts sont envoyés dans le cercle qui « convient » le mieux à leur péché.
Plus les actes commis sont graves, plus le damné est envoyé loin de Dieu, dans le cercle le plus profond.

Deux types de péchés sont retenus :

  • Ceux relevant d’actes de violence (physique) : le corps.
  • Et ceux relevant de l’esprit humain : la psyché.

Pour Tobias l’intrigue doit refléter ces deux niveaux de conflit. Un conflit extérieur, matériel, et un conflit intérieur, émotionnel.

Eviter les coïncidences ou le hasard pour sortir vos personnages d’une galère, ils seront vite apparentés à un deus ex machina. En revanche, ils peuvent être « acceptés » s’ils compliquent la tâche du héros.
La réalité fictionnelle doit être cohérente et mettre en place des interactions (monde-personnage) constantes au long du récit pour créer du sens. Car même dans un film fantastique ; la magie obéit à des règles.

Pour moi chaque monde extraordinaire doit obéir à des règles pour éviter des deus ex machina en permanence. Si vous ne le faites pas, vous risquez d’obtenir des scènes comme dans Once Upon a Time ou Lost, avec un scénariste qui sort de son chapeau n’importe quoi pour aider ses personnages ou les mettre en galère.
Par la même occasion il perd la tension du spectateur qui se dira que les personnages ne risquent rien et que même s’il y a un problème, ils pourront revenir à la vie avec un poil de chat, une larme magique et les couilles d’un bouc (c’est une vanne évidemment, mais la série Once upon a time n’est vraiment pas loin de mon propos) …
Un monde magique et fantastique doit répondre à des règles, avoir quelques limites.
Frodon ne jettera jamais de boule de feu bien que l’on soit dans un univers fantastique.

NOTA BENNE :
Souvenez-vous, l’extraordinaire ne se vaut pas à lui-même. Vous devez raconter quelque chose qui touche le spectateur. Si vous écrivez une histoire avec une multitude de lieux et de personnages fantastiques, ou avec un grand nombre d’explosions et de cascades, mais sans réel fond, peu de gens voudront entrer dans votre univers.

Mais souvenez-vous que l’arc transformationnel de votre personnage n’est pas toujours la base de votre histoire. Il peut vous aider à garder un fil rouge, mais certains personnages comme James Bond ou Katniss Everdeen ne changent pas (au contraire, ils font changer le monde qui les entoure)

L’action fais avancer l’histoire, mais dans un conflit psychologique c’est plus subtil, et la tension se trouve davantage dans les personnages que dans les événements.
Essayez de trouver un équilibre entre action et personnages.

NOTA BENNE :

Ne pas confondre la fin de l’acte 2 et le climax.
Si le climax est une sorte d’apothéose, il n’implique pas forcément des explosions en pagaille, mais une tension dramatique puissante. Souvenez vous qu’un couteau peut créer bien plus de tension qu’une mitraillette.

L’intrigue et le conflit :

1) La tension vient du conflit.
Prenons la situation suivante :
Un garçon de 11 ans veut embrasser une fille de sa classe, il lui demande, elle répond oui.
C’est cool pour lui, mais en tant que spectateur on s’ennuie.
Si la fille lui répond non, « tu es trop bête !». La scène d’après sera la conséquence directe, émotionnelle et comportementale, du garçon face à la réponse de la fille.
Les effets de cette cause peuvent être multiples et arriver immédiatement ou dans des scènes ultérieures.

2) la tension est créé par l’opposition :
L’antagoniste, peu importe sa forme (une personne, une entité ou le héros lui-même) doit être créé pour mettre des bâtons dans les roues du protagoniste.
Si nous reprenons notre exemple ci-dessus, le héros a deux possibilités : abandonner ou essayer de convaincre la fille qu’il n’est pas stupide.
Une tension locale se joue, celle du refus qu’il lui faudra digérer, mais également une tension plus globale, un conflit interne qui se résume à une question « Suis-je vraiment stupide ? ».
Le protagoniste cherchera une manière de prouver qu’il ne l’est pas (puisqu’au fond personne ne l’est, on a juste des intelligences différentes.

Finalement, qu’il réussisse à l’embrasser ou non, il réussira à prouver aux autres et à lui-même, qu’il est intelligent (au moins dans un domaine). 
Ce qui fait l’histoire, c’est la quête intérieure de ce petit garçon qui doit prouver au monde qu’il n’est pas bête, que le système scolaire l’a catégorisé comme stupide alors qu’il est loin de l’être. C’est la quête intérieure émotionnelle qui fera l’histoire, et non le prétexte banale du bisou.

Je parle ici, d’un petit garçon, mais cet article donne l’exemple d’un homme alcoolique.
Je vous conseille de le lire car il est très bien écrit.

3) plus l’opposition se renforce, plus la tension doit croitre :
Le conflit doit s’intensifier jusqu’au climax (tout comme la tension) pour garder votre spectateur en haleine (même si vous pouvez laisser votre spectateur souffler un peu)
 « faites-les beaucoup pleurer et rire un peu »
Mais l’histoire tout entière ne se nourrit pas seulement de conflit local. Il y a aussi un conflit global.
Le refus de la jeune fille constitue l’incident déclencheur, mais le protagoniste est en proie à chercher qui il est (en plus du story goal qui est de « pécho »).
Peut-être que votre personnage ne donnait pas le meilleur de lui-même au début de l’histoire, qu’il doit changer aussi. Mais si c’est le cas, les efforts qu’il fera seront limités par différents obstacles sur son chemin qui renforceront l’opposition. La difficulté augmente au fur et à mesure, chaque épreuve en amène une autre, plus ardue, aux enjeux plus importants, pour nous amener au climax où le héros réussira pour de bon ou finira par échouer.

Ronald B. Tobias pense qu’une histoire ne peut fonctionner si celle-ci est constituée uniquement de tensions locales.

4) les événements influent sur l’arc transformationnel du personnage :
Votre personnage n’est plus le même à la fin de l’histoire qu’au début.
Mais l’arc dramatique du protagoniste n’est pas toujours obligatoire, d’autres personnages peuvent changer, ou le monde lui-même. Et si personne ne change, il faut que le reste des éléments soit bien construit pour ne pas perdre l’attention du spectateur.
En tant qu’auteur on doit quand même se demander à quel point ce que votre personnage va vivre va l’affecter dans sa personnalité. S’il ne change pas, alors il est condamné à reproduire les mêmes erreurs et à subir une nouvelle fois les problèmes du film.

Les évènements doivent être significatifs et en lien avec l’intrigue ; ne vous faites pas emporter par vos personnages et votre imaginaire en construisant des scènes « cool » mais pas tout à fait à propos. Chaque évènement doit faire avancer l’intrigue, sinon il y a de grandes chances qu’il faille les supprimer.
Avec le nombre de contenus et de stimulations auxquels on fait face aujourd’hui (Tik tok, réseaux sociaux, pub, ordinateur, plateforme de VOD etc.) les disgressions peuvent ennuyer le spectateur et le faire passer à autre chose. Ne vous éparpillez pas.

Si vous pouvez supprimer une scène et que l’histoire ne de désagrège pas d’elle-même, alors il y a de fortes chances que cette scène n’ait pas sa place dans votre film.

Anton Tchekhov écrit : “Remove everything that has no relevance to the story. If you say in the first chapter that there is a rifle hanging on the wall, in the second or third chapter it absolutely must go off. If it’s not going to be fired, it shouldn’t be hanging there. » Retirez tout ce qui n’a pas de pertinence avec l’histoire. Si vous dites dans le premier chapitre qu’il y a un fusil suspendu au mur, dans le second ou le troisième chapitre, il doit être utilisé. Si personne ne tire un coup de feu, il ne devrait pas être suspendu là.

5) ce qui provoque les évènements doit sembler imprévu :

Chaque évènement a une raison, un lien logique de cause à effet, mais le lien de causalité entre chaque évènement gagne à sembler imprévu. Donner des indices à votre spectateur sur certains éléments qui reviendront dans l’acte 3 par exemple, mais faites en sorte qu’il s’en souvienne sans pour autant qu’il ne le remarque trop et anticipe ce qui va se passer.
Surprenez le lecteur, ne rendez pas l’intrigue prévisible. Faites faire un plan a votre protagoniste qui ne se déroule pas comme prévu !
Dans la vie, les coïncidences et le hasard prennent place en permanence, mais dans un récit tout a un lien de cause-conséquence. Dans un monde fictif, chaque cause a une raison, et si vous ne pouvez expliciter cette dernière, alors la cause sera due au hasard ou à des coïncidences et vous perdrez en crédibilité.

Vous êtes le maitre de tous les événements qui vont se passer dans votre histoire, n’utilisez pas de deus ex machina pour sortir vos personnages d’un mauvais pas dans lequel VOUS les avez mis.

6) Votre personnage doit être moteur de l’action en particulier au climax :
Il doit faire face seul
Si l’intrigue est une question alors le climax est la réponse, et c’est à votre protagoniste de gérer l’action et non à un personnage secondaire. Seul le protagoniste de votre histoire peut régler son problème, sinon il n’aura pas changé.
La résolution du climax révélera si le/la héro/héroïne a appris de ses erreurs pour vaincre l’antagoniste, ou si l’antagoniste gagnera. Dans les deux cas le protagoniste doit être seul. (C’est pour ça que dans l’héroïque fantaisie ou autre, la team du héros se sépare souvent pour combattre les sbires, laissant le grand méchant au personnage principal.)

Intrigues secondaire / B stories :

Retenez bien : les intrigues secondaires se nourrissent de la principale
Ne vous éloignez pas de la prémisse et de la thématique dans un film (dans une série le temps et la structure sont différents)

La B story se révèle souvent être un « love interest » en règle générale décrite dans l’acte 2. Mais encore une fois, ne mettez pas une histoire d’amour si ça ne sert pas la transformation de votre protagoniste ou la thématique. Je trouve par exemple que toutes les histoires d’amour dans les « James bond » ou « Mission Impossible » sont fades car elles n’ont rien à faire là. Elles semblent posées au milieu du film comme un cheveu sur la soupe et n’apportent rien, ni à la thématique, ni aux personnages.

Les B et C stories permettent d’étoffer un peu votre scénario, d’explorer de nouvelles dimensions tout en développant votre concept et votre thématique
Les intrigues secondaires doivent donner de la puissance à l’intrigue principale mais ne pas l’étouffer.

Le premier acte décrit les personnages et le monde ordinaire.
Le deuxième acte met en place le premier problème pour votre protagoniste et les intrigues secondaires.
A savoir qu’une intrigue secondaire ne touche pas forcément le personnage principal alors qu’une B Story si.

La A story apparait au moment de l’incident déclencheur et se consolide lors de la prise de décision et du passage à l’acte 2.
La B story est souvent plus émotionnelle (voyage intérieur) que la A (motivée plus par l’action).

L’intrigue secondaire permet plutôt d’avoir d’autres personnalités à suivre (sidekick, mentor, antagonistes), et donner un peu de souffle à l’intrigue principale. Si l’intrigue secondaire ne touche pas votre protagoniste et votre intrigue principale directement, les évènements devront tout de même se rejoindre et influer. La thématique doit être respectée et étoffée.

Conclusion : Choisir la fin à partir d’une multitude de chemins possibles :

Rappelons les bases d’une intrigue classique (selon mc Kee) :
– un protagoniste actif (même s’il est parfois passif) luttant contre des forces externes (l’antagonisme) et internes (psyché)
– Poursuite d’un objectif pour satisfaire un désir conscient (avant de prendre conscience de son besoin inconscient)
– chaque événement pouvant être lié par une relation de cause à effet dans une réalité fictionnelle cohérente. Le traitement des actions peut être chronologique ou non (flash-back, flash forward etc.). On peut avoir un temps non linéaire comme dans Mister Nobody ou La vie est belle de Capra (qui met en scène une réalité alternative).
– Le final marquant un changement irréversible (même si une fin ouverte laisse au spectateur la possibilité d’imaginer les réponses aux questions posées par l’histoire en fonction de son ressenti).

Une histoire demande beaucoup de travail et de relecture pour sembler naturelle et cohérente.
La connaissance des structures scénaristiques ne brime pas votre inspiration, elle l’a poli comme un diamant. Rien ne vous empêche de briser des règles mais faites-le en toute connaissance de cause, en ayant compris les bases d’abord. Apprenez à vous détacher des idées émotionnellement fortes pour vous, et sachez les transmettre au spectateur en les passant sous votre regard « froid » d’ingénieur.  

Lorsqu’on écrit une histoire, pour chaque évènement vous avez des centaines de dénouements possibles, ou de manière de continuer l’histoire. Votre imagination carbure, les choix se multiplient mais au final, certains d’entre eux sont meilleurs que d’autres, plus cohérents, plus puissants, plus vrais … Mais pour donner l’illusion que tout se déroule naturellement, vous devez analyser chacune de vos idées pour voir laquelle sera plus apte à embellir votre histoire.

Une fin fermée implique que toutes les questions que se posait le spectateur trouve une réponse avant la fin. Il n’y a pas d’émotion latente ou de frustration, c’est la fin.

Une fin ouverte nous laisse en suspens, c’est à nous de construire la fin, fermée ou pas, dans notre tête. Certains préfèrent interpréter la fin de différentes façons, apporter ses propres réponses ; personnellement, je déteste ça. Quand je paye pour un film, je veux que le scénariste finisse son histoire, si c’était à moi d’écrire pour lui je n’aurais pas payé 12 balles pour ma place de ciné. Mais bon, c’est à vous de voir, certains préfèrent prolonger l’expérience du film en cherchant des réponses même lorsque les lumières de la salle se sont rallumées. Un peu comme dans Mulholland Drive.

Sur ce, c’est la fin de cet article.
J’espère qu’il vous aura plu, n’hésitez pas à le partager à ceux qui en auront besoin et à visiter le site de SCENAR MAG qui m’a beaucoup aidé dans ces recherches.

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En attendant, prenez soin de vous, et à la prochaine pour plus de contenu ! 😊

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